Diablo : Genèse et rédemption d’un titan
Genre : Livre
Auteur(s) : Benoît “ExServ” Reinier
Éditeur : Third Editions
Langue : Français
Sortie France : 31/05/2018
Prix : 29€90
Caractéristiques
Pages : 304
Format : 160 mm × 240 mm
Couverture : cartonnée
Publié chez Third Editions, « Diablo : Genèse et rédemption d’un titan » possède un rendu identique à celui de livres tels que « Générations Mario : C’est l’histoire d’un plombier », « Générations Sonic : L’élégance d’un hérisson bleu », et « The Heart of Dead Cells: A Visual Making-Of ». De fait, la qualité est bien entendu au rendez-vous, mais cela n’est pas surprenant venant de la maison d’édition qui a toujours mis un point d’honneur à publier des œuvres de bonne facture. On retrouve ainsi la même formule réussie que dans les autres publications de la collection « saga » : une couverture rigide dotée de plusieurs textures, une illustration qui permet d’immédiatement identifier le sujet du recueil, un papier épais agréable au toucher, un ruban (rouge, cette fois-ci) permettant d’interrompre et reprendre sa lecture facilement, ainsi qu’une quatrième de couverture qui, comme une fois n’est pas coutume, réussie à piquer la curiosité du lecteur afin de lui donner envie de se plonger dans le travail de fourmi — un peu plus de 300 pages — réalisé par l’auteur.
Benoît « ExServ » REINIER nous propose ici cinq chapitres accompagnés d’une préface signée David GLENN, le directeur artistique de Blizzard North, rien que ça ! La première partie de l’ouvrage, « Du rêve au phénomène » est consacrée à l’évolution de la saga. On ne s’intéresse donc pas directement à Diablo, mais aux personnes à l’issu de ce projet, dont principalement David Brevik et les frères Schaefer, afin de mieux comprendre le contexte de sa création, les diverses problématiques rencontrées, les solutions qui ont dû être apportées malgré les conflits entre les branches Nord et Sud qui ont pu émerger tout au long de ce processus. L’auteur met directement l’accent sur certains concepts clés qui tenaient particulièrement à cœur au trio susmentionné. L’idée principale étant de faire un jeu pour tous, mais avant tout pour eux-mêmes ; un jeu qui serait compréhensible et jouable par nul autre que leur propre mère, d’où par exemple des phases telles que le mum test, misant ainsi sur une approche dite « universaliste ». De plus, on en apprend d’avantage sur la philosophie de la société avec son fameux « when it’s done » et sa volonté de proposer des jeux aboutis, quitte à avoir du retard sur leur planning. Ici, ExServ nous présente la formule Diablo et les objectifs visés au fil des jeux, notamment en ce qui concerne les prouesses techniques, la narration, l’arbre des compétences, le mode en ligne sur la plateforme Battle.net préfigurant d’ailleurs la naissance d’un nouveau genre, mais aussi l’avènement des MMORPG ainsi que toutes les polémiques liées à la triche et aux hôtels de vente qui ont causé bien des problèmes à Blizzard. Enfin, plusieurs paragraphes sont dédiés au rôle joué par des sites comme Metacritic et par les joueurs dans ce que REINIER nomme « la toxicité des communautés ». C’est à travers le développement d’Internet et des réseaux sociaux que ces communautés de joueurs peuvent émettre des critiques et exprimer leurs attentes ainsi que leur mécontentement, mettant une pression supplémentaire aux développeurs, dont le rude métier nous est présenté, en particulier au moment des crunch time, période où leur vie privée passe littéralement au second plan.
La seconde section du livre, « Un univers en expansion », aurait pu aussi être complétée de la mention « et en extensions », car celles-ci seront passées au peigne fin au même titre que chaque épisode de la trilogie, dont les mythes, légendes et histoires seront analysés en détail, montrant à quel point la licence est riche, soignée, et approfondie d’opus en opus. Notre écrivain fera, entre autre, une distinction entre l’intrigue originale (celle du manuel de Diablo I) et la version enrichie afin de noter quelques rares incohérences, mais surtout dans le but d’aborder la création de tout un monde à la complexité à la fois étonnante et passionnante. Seront donc décryptés les lieux, les personnages, les classes, ou encore le scénario opposant les anges (le conseil d’Angiris, l’autorité des Cieux, incarnant des vertus) aux démons (les sept démons de l’Enfer, symboles de divers vices) avec ses différents actes. Cette section se révèle être une vraie mine d’or, car le lecteur ne lit pas seulement la genèse de la saga, mais également de véritables pages d’Histoire ayant inspiré les créateurs de cette trilogie devenue culte grâce, par exemple, au génie de Blizzard qui justifie le gameplay à l’aide des intrigues de chaque opus.
Le chapitre 3, « Analyse esthétique », porte quant à lui sur l’ambiance résolument gore des premiers softs qui, progressivement, s’orienteront vers le fantasy inspiré de TOLKIEN avec Diablo III. La variété des paysages, du bestiaire, des symboles, des palettes de couleurs et des cinématiques est évidemment mise en avant, mais aussi des critiques effrayées à l’idée que l’orientation future soit trop cartoon, colorée, et donc en désaccord avec les deux premiers softs. Néanmoins, l’auteur reviendra également sur tous les éléments artistiques composant la fresque colossale qu’est Diablo tout en s’intéressant à son identité sonore, quelque peu délaissée dans le troisième volet de la licence : musiques, bruitages, dialogues, voire même gestion du silence afin d’instaurer un climat encore plus anxiogène. On en apprendra plus sur la structure des pistes, l’utilisation de samples ou d’effets comme les delays et les réverbérations, les thèmes des lieux ainsi que des boss, le recours à un orchestre symphonique, en passant toujours par l’incorporation de ces éléments directement au cœur du gameplay. La question étant de savoir comment tous ces éléments, et en particulier le son, peuvent donner le ton à tout un univers.
On en arrive ainsi à la quatrième fraction de l’ouvrage, « La formule Diablo », centrée sur les éléments de gameplay de l’utilisation de la souris sur PC aux adaptations sur consoles, ExServ abordera la vue isométrique, le système des classes, le corpse run, les loots, les niveaux de difficultés, les failles probatoires, les saisons, le multijoueur, les compétences ou encore l’artisanat, pour n’en citer que quelques-uns. À ce titre, un test de Diablo III sur Nintendo Switch, est d’ailleurs disponible ICI, pour celles et ceux qui voudraient en apprendre un petit peu plus à ce sujet.
Avant la conclusion, le travail se termine par le chapitre « Héritages ». REINIER parle de la difficulté de catégoriser ce jeu aux multiples casquettes. Il propose d’ailleurs un retour sur divers Diablo-like et présente des titres comme Darkstone (1999) ou Baldur’s Gate: Dark Alliance (2001), en passant par Titan Quest (2006) et Lost Ark (2018).
La rédaction est presque irréprochable et cela semble être une constante chez ExServ qui utilise les termes techniques adéquates tout en proposant des explications dans les notes de bas de page pour les personnes qui ne maîtrisent pas le jargon vidéoludique. Par ailleurs, il a eu l’excellente initiative d’ajouter un glossaire à la fin de son recueil, ce qui est très pratique et bien pensé.
Trouver des défauts à ce travail d’orfèvre nécessite de chipoter sur des petits détails. Je n’en ai trouvé que trois qui, en plus, dépendront de chaque lecteur : 1. Certains pourraient ne pas apprécier le fait qu’il s’adresse directement à eux et qu’il opte pour une analyse parfois plus subjective, car basée sur des intuitions personnelles ; 2. il y a quelques répétitions pas toujours nécessaires, notamment dans la première partie du livre ; 3. la police d’écriture m’a semblé un peu petite en comparaison à celle utilisée dans la nouvelle saga « Making-Of » de Third Editions, plus agréable à lire.
Là encore, Benoît REINIER parvient à une formidable réussite grâce à sa rencontre avec les créateurs de Diablo, c’est-à-dire la meilleure source possible pour un auteur qui souhaite rédiger un livre ! Les notes de bas de page ainsi que la bibliographie très fournie et organisée par média permet d’approfondir sa lecture et d’obtenir encore plus de détail, voire même de mettre la main sur divers documents, comme par exemple le game concept de 8 pages de Diablo I (1994) : un véritable trésor (sauf si on est anglophobe) ! Enfin, l’auteur s’aventure même sur quelques projections concernant un hypothétique Diablo IV à l’issue de toutes ses recherches. On regretterait même qu’il n’y ait pas consacré plus de paragraphes tant c’est intéressant et que ça tient la route !
« Diablo : Genèse et rédemption d’un titan » est un must-have pour tout fan de la saga. L’ouvrage se lit avec beaucoup de plaisir, est très accessible — au même titre que la licence de Blizzard, d’ailleurs ! — et est méticuleusement découpé avec ses cinq chapitres denses où tout est décrypté en détail par ExServ qui excelle dans ce domaine. Que vous souhaitiez apprendre des anecdotes sur le contexte de création de Diablo, approfondir votre connaissance du scénario ou des classes de la trilogie, ou faire le point sur la complexité et les révolutions apportées par cet univers devenu culte, ce véritable travail de recherche puisant ses informations directement à la source est fait pour vous !
ExServ a écrit : « c’est l’intuition qui nous guide sur de nombreux sujets ». Il est évident que la sienne est excellente, à l’image de ce recueil qui rend là un très bel hommage à une légende du jeu vidéo.
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